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Arthur Van Hecke : une aquarelle.

dimanche 18 septembre 2011, par Robert Vigneau

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Puisque nous célébrons Arthur Van Hecke, voici une aquarelle (50x65) de 1961 que, pour m’épargner les délires des intrus, je réserve à mon espace secret. Sans imagination, je l’ai intitulé Végétaux .

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On voit bien en effet qu’il s’agit de feuilles bousculées ; j’y devine des épis, des profils de bourgeons, des élans de feuilles. C’est vert, noir et rose. La touche verte botanique a dû venir en dernier puisque le même pinceau a servi pour signer.

Mais je garde désormais cette image pour moi seul, loin des visiteurs : outre les tardifs zélateurs du mouvement Cobra, des visionnaires romanesques y ont découvert un motif de cheval bondissant, le sabot en bas à droite, tu ne vois pas, Robert ? et ce poitrail en cavale et ce cri noir du jockey confronté à la colère du pur-sang.… D’autres ont aperçu une fête, mais oui : un manège tournoyant devant le sombre ennui des adultes béats brandissant une barbe-à-papa à la fraise…

Bien entendu, tout le monde a raison.

Végétale, animale, festive, peu importe le motif, cette aquarelle représente - ou plutôt : traduit le jaillissement élémentaire. Ici, seul importe le geste.

Il est guidé par deux impératifs : d’une part, l’aisance professionnelle du peintre, sa liberté d’exécution qui suppose la maitrise du métier, mais associé, d’autre part, à son aptitude, à sa puissance à capter l’irruption vitale, autrement dit en d’autres religions : sa capacité à méditer.

Les variations de nuances et la prestesse du pinceau donnent à ce tableau sa spontanéité et sa vie. Le choix du sujet révèle que l’artiste a rejeté toute convention et qu’il désire aborder le problème de la figuration d’une façon toute subjective…

Cette citation s’applique parfaitement à la démarche d’Arthur Van Hecke. Elle concerne cependant le peintre Leang K’ai (actif vers 1200 !) ; elle est tirée d’un ouvrage qui m’accompagne depuis plus d’un demi-siècle : La Peinture chinoise, par Peter C. Swann, traduit de l’anglais par Georges Lambin, Pierre Tisné éditeur, Paris. Je n’ai pas choisi ce livre par hasard : sur la première page , je lis ces mots manuscrits et datés :

à mon pote Robert Vigneau

A. Van Hecke 59

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Faut-il préciser ? ______________________________________

Parce que c’était un peintre inné, impulsif et comme viscéral, autodidacte négligeant des orthographes, à l’aise avec les plus simples de ses contemporains, on imagine parfois Arthur Van Hecke à l’écart de ce qu’il est convenu de nommer la culture.

Rien n’est plus faux : ami de grands collectionneurs, de savants, lecteur des poètes, familier des musées, des livres et de hautes musiques, Arthur fut une exigeante conscience créatrice. Il imprégnait son entourage. Il obligeait chacun à se surpasser. Par exemple, qui s’intéressait alors à l’art chinois assez pour entrainer son "pote" dans l’aventure de ce qui me paraissait marginal ou exotique tandis qu’Arthur dialoguait naturellement avec le présent des siècles ?

photographie©Gabriel.L.Stauffer


Après publication de cette page, je reçois de l’ami Jean-Pierre Adalbéron la référence d’une vidéo au sujet de la culture d’Arthur Van Hecke. Et comme Jean-Pierre a pris soin de cliquer sur le mot aquarelle de mon article, qu’il y a découvert en lien cette curieuse allusion au sumi-é – curieuse mais pas si incongrue que cela s’agissant d’Arthur… En définitive, il me signale que je visais assez juste : « Lors du panoramique sur sa bibliothèque, voyez le livre "studio des 10 bambous" : son intérêt pour l’art asiatique se confirme ! »

http://www.dailymotion.com/video/xihose_arthur-van-hecke_creation