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L’arbre

dimanche 16 juillet 2017, par Robert Vigneau

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L’ARBRE
 
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Je ne sais pas. Nul ne le sait. Peut-être
un soldat a-t-il collé sa bouche
froide aux racines des herbes, dents de salpêtre,
un oiseau très vieux fut-il la proie des mouches
ou bien comptant son or taché de sang
une fille tomba jadis en mal d’enfant ?
 
Ici, finies la guerre et la sueur.
Cet arbre debout contre nos drames,
ce chêne révoque toute peur
et me protège mieux qu’une arme.
Madame la terre, seigneur mon enfant,
je ne veux pas verser le sang.
 
Je serre un fusil entre mes pattes.
J’attends. Le temps ne coule guère.
On dit : « Il faut que tu te battes,
Maitre de ce pays par droit de guerre,
Et puis par paix têtue, têtue pour ton enfant »
Et moi je dis : « je ne possède pas mon sang ».

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paru dans la Chandelle Verte, n°27, mai 1959 : Les petits soldats… 

En complément : Le Mois du lièvre.